Akhénaton, fondateur du monothéisme

Mardi 01 Septembre 2020-00:00:00
' Ayman Elghandour

Akhénaton est le fondateur du monothéisme, il considérait tout ce qui lui précédait comme loin de la vérité. Il ne s'est pas contenté de placer son dieu à la tête des autres, mais à leur place. Sa croyance a été traduite en mesures pratiques : interruption des cultes, fermeture des temples, destruction des statues…etc. C'est ce qu'affirment Mahfouz et Sinoué. Le second nous décrit comment Akhénaton ne tarda pas à décréter la fermeture des temples, la confiscation des idoles et l'effacement des noms des divinités de tous les monuments. « Abattez les statues! Brisez les figures ! Fracassez les fresques ! À  partir d'aujourd'hui, je ne veux plus que subsiste une trace d'Amon ». Par conséquent les prêtres dont la richesse et la puissance étaient menacées, n'ont cessé de manifester leur farouche opposition au jeune pharaon. 

Avant le règne d'Akhénaton, la divinité d'Amon était la plus puissante en Egypte. D'après Serge Sauneron : « Amon conquit rapidement, entre les XXe et XVe siècles avant notre ère, le titre justifié de roi des dieux, et la position inébranlable de protecteur tout-puissant de la souveraineté thébaine. Installé à Thèbes et enrichi par les biens que les expéditions royales faisaient affluer en Egypte, ce dieu thébain était devenu le favori parmi les autres divinités. C'est ce qu'affirme Mahfouz dans son roman, à travers des mots significatifs, prononcés par le grand prêtre. « Le trône repose sur trois piliers : Amon le maître des dieux, le pharaon et la reine ». La structure de cette phrase indique l'importance d'Amon sur lequel comptait le trône, il précède le roi et sa femme. Cette richesse et cette importance ont été ébranlées par Akhénaton, ce qui a nourri la haine des prêtres contre lui. Ils n'épargnaient aucun effort pour le tuer. 

La nouvelle religion d'Akhénaton avait du mal à prendre pied dans un pays ancré dans ses anciennes traditions. Elle s'est heurtée au clergé qui se dressait comme un véritable barrage et comme un cercle clos auquel personne ne pouvait accéder. A cette époque, il était connu qu'après la mort d'un prêtre, son fils devait le remplacer. D’où la continuité et la solidarité du clergé que Serge Sauneron tient pour un « véritable État dans l'État, qui pouvait à l'occasion imposer sa volonté au souverain ». 

Ce sont les rois eux-mêmes qui ont rendu les prêtres plus forts. Poussé par son amour propre, chacun d'entre eux a construit des sanctuaires capables de rivaliser en grandeur avec ceux de ses aïeux. Petit à petit, les prêtres ont commencé à acquérir une puissance aussi remarquable que celle des pharaons. Horemheb leur a donné l'occasion de renforcer leurs pouvoirs. De plus, Herihor, le grand prêtre de Thèbes, monte sur le trône vers l'an 1000 avant J.-C. 

Les deux romanciers ont réussi à mettre en lumière la haine cléricale vis-à-vis d'Akhénaton. Pour eux, c'est le clergé d'Amon qui a mis fin à sa vie. D'une part, Mahfouz nous fait entendre les paroles du grand prêtre, adressées à Bantou, le médecin personnel du pharaon: « Pouvons-nous compter sur toi pour sauver la nation de la destruction qui la menace ? » Si l’on peut supposer que ces paroles sont une tentative de tuer le pharaon, Mahou le chef de la police nous raconte une tentative réelle d’assassiner le jeune roi. Il dit : « En ces jours noirs, un tueur à la solde des prêtres se glissa jusqu'à sa retraite pour l'assassiner dans l'obscurité, et il eût triomphé si je ne l'avais arrêté d'une flèche en plein cœur ». Par ailleurs, Sinoué répète ce qui précède. Son héros Keper affirme que les prêtres d'Amon ont tué Akhénaton « en recourant à la science, afin que sa mort paraisse naturelle ». Cet avis est justifié dans un autre endroit où il nous informe qu'Ani, son médecin, a reconnu les symptômes de la maladie et lui a préparé un médicament. « Bizarrement, s'exclame-t-il, au lieu de s'améliorer, l'état du souverain empirait ». 

La mort d'Akhénaton n'est pas décrite, mais exprimée indirectement à travers les paroles des personnages. Les deux romanciers veulent dire que le pharaon est mort dans des circonstances ambiguës et obscures qui demeurent ignorées jusqu'à nos jours. En tout cas les citations précédentes révèlent le fanatisme du clergé d'Amon qui tentait sans cesse de tuer le roi au nom de la religion et sous prétexte de sauver la patrie. C'est le même fanatisme dont souffre l'Égypte d'aujourd'hui.